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Commentaire sur :

Georges Bernanos "La France contre les robots" Robert Laffont 1947

Je viens de relire "La France contre les robots" pour me remémorer ce que Bernanos disait sur les bombardements. C'est un livre à la fois irritant, attachant et attirant.

Irritant, parce que Bernanos se fait un modèle de la chrétienté française des XIème et XIIème siècles, qu'il idéalise à outrance. L'homme de ces époques, tel que Marc Bloch l'a décrit, n'est pas aussi pur et aussi saint que Bernanos le croyait.

Attachant, parce que par delà la religiosité et les références historiques plus ou moins sollicitées, et même à travers elles, on sent en permanence le courage, la loyauté, la rectitude du jugement qui ont permis à Bernanos de se tenir toujours au niveau de l'histoire de son temps, et de faire toujours les bons choix : contre le clergé assassin de la guerre d'Espagne, contre les dictatures, contre la collaboration, pour la résistance, pour la rectitude du coeur et du jugement.

Attirant, parce que sa langue est pure, énergique, que les mots justes viennent naturellement sous sa plume, et que son style est adéquat à son caractère.

En y réfléchissant un peu plus, je comprends mieux ce qui me plaît chez Bernanos, comme d'ailleurs chez Péguy. D'une certaine façon, peu importe que l'histoire telle qu'ils se la représentent soit inexacte ou incomplète, car cette représentation résulte d'un choix personnel, et qu'elle vise non pas l'exactitude, mais l'exemplarité. Chacun de nous est invité à choisir, parmi les facettes de sa personnalité, celles qu'il va développer et celles qu'il va laisser dans l'ombre, et ce choix est l'un des plus importants qui nous soient proposés : nous sommes étroitement conditionnés par le possible, mais nous sommes libres de choisir à l'intérieur de ce possible, et le choix entre nos diverses vies possibles n'est pas prédéterminé. Si Péguy et Bernanos idéalisent l'histoire de France, c'est pour faire ressortir, dans notre héritage, la part qui selon eux mérite le plus d'être méditée, cultivée, et à partir de laquelle nous pouvons construire une société humaine et vivable.

Comprise ainsi, la polémique engagée par Bernanos contre la "société des machines", et l'apologie corrélative de l'humanité médiévale, ne doivent pas se comprendre comme un appel nostalgique au "bon vieux temps" (expression qu'il déteste), mais au contraire comme un appel très moderne et même futuriste à la construction d'une société où il serait possible de mener une vie digne de l'être humain.