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Message de Robert Muller, d'Air France, 6 août 1999

Profitant de cette période très très calme, j'ai enfin pris le temps d'aller musarder sur le site pour y trouver des nouvelles d'une part, et plus égoïstement, y découvrir sa substantifique moelle .... et pour ne pas le cacher, un peu de détente !

... et c'est en lisant la réponse que vous faites aux commentaires de F. Jacq sur le livre "Economie des Nouvelles Technologies" que j'ai relevé votre attachement aux concepts de "stock" et de "flux".

Je n'ai pas lu l'ouvrage en question, et limiter ma réaction à la simple lecture de ces extraits ignore le contexte dans lequel tout cela s'inscrivait, mais je tiens malgré tout à vous faire part de mes quelques humbles idées sur le sujet car je vous soutiens pleinement dans cette approche.

J'ai mené une réflexion personnelle il y a environ une dizaine d'années sur la modélisation des "systèmes". Il s'agit là bien entendu de "systèmes d'information" et non pas de "systèmes informatiques". Pour bien cerner ce que j'entend par ce concept, on pourrait assimiler "Système" à "Entreprise", en prenant soin d'assortir l'Entreprise d'une contrainte d'homogénéité dans son métier principal, et en la regardant, on va dire sous un angle "fonctionnel invariant", et non pas organisationnel qui jouerait le rôle de miroir déformant. Moyennant ces quelques précautions, on a une assez bonne approximation de ce que peut recouvrir le mot "Système" dans le cadre de cette recherche de modélisation.

Je n'entrerai pas dans tous les détails de la méthode ni de son mode de représentation. Mais je peux vous livrer quelques conclusions auxquelles je suis parvenu en déroulant cette approche, et qui touchent directement les concepts de "stock" et de "flux" que vous évoquez :

1 - le système d'information, à un instant t, n'est composé que de stocks : des stocks de moyens humains, matériels, des stocks de produits et de services, des stocks financiers, des stocks de clients, des stocks de savoir-faire, des stocks de connaissances, etc. etc. (je n'ai décelé aucune exception, et je pense avoir démontré qu'il ne peut pas y en avoir).

Ces stocks ne sont pas nécessairement réels; ils peuvent n'être que potentiels, les "individus" qui le compose n'étant pas formellement identifiés a priori (individu s'entend au sens d'une occurrence logique ou réelle d'un concept).

Ces stocks ont une place prédéterminée dans le système d'information (au sens conceptuel, cela va de soi).

2 - les stocks évoluent sous l'effet de flux générés par des lois d'échanges visant l'équilibre permanent du système. En d'autre termes, l'évolution d'un stock entraîne obligatoirement l'évolution d'au moins un autre stock, sous peine de créer un déséquilibre qui se concrétisera dans la réalité par des incidents et/ou dysfonctionnements.

Par exemple, ajouter un nouveau vol au programme de vol (stock de vols) doit entraîner la diminution du stock d'avions disponibles, du stock de pilotes disponibles, etc. Ce sont les contreparties obligatoires de l'existence du vol au catalogue. S'il n'y a pas de moyens disponibles, il faudra chercher à les acquérir. A défaut, le vol annoncé ne pourra pas avoir lieu.

Autre exemple : l'émission d'un coupon, qui fait évoluer le stock de billets émis, a pour conséquence de faire évoluer les stocks passagers réservés en échange d'une évolution du stock de chiffre d'affaire.

Il n'est pas nécessaire que l'échange soit synchrone. Dans ce cas, on doit voir apparaître dans le système un stock échéancé, surveillant la bonne réalisation du principe d'échange. Tout ce qui relève du domaine administratif et/ou contractuel est assujetti en général à ce mode de fonctionnement. Typiquement, les systèmes de relance, ou l'échéancier des factures fournisseurs à régler.

(Attention aux assimilations à des processus : si une loi d'échange peut couvrir tout ou partie d'un processus, un processus n'est pas nécessairement assujetti à une loi d'échange explicite).

Ce que je dis en fait, c'est qu'il existe une relation de cohérence entre les stocks et qu'elle est entièrement prédéterminée dans tout système (on peut montrer que le système est constitué d'anneaux de cohérence assurant le lien entre les stocks et les lois d'échange.).

3 - La marche du système, ce que l'on appelle "réalisation", est assurée par la loi des "rendez-vous" : il s'agit en fait de réunir "physiquement" des occurrences de stocks, leur association produisant de nouveaux éléments de stocks :

exemple simplifié : pour qu'un passager soit transporté, il faut réunir à une date donnée, une heure donnée, un lieu donné, un avion, des pilotes, des agents d'enregistrement pour réaliser le rendez-vous avec le passager.

Le "rendez-vous" n'est pas nécessairement prédéfini; on peut très bien s'inscrire dans un logique de moyens mis à disposition en un lieu donné, pour une période de temps donnée et attendant les sollicitations. C'est typiquement le cas des centres de réservation. Cela n'enlève rien au principe du rendez-vous, il est simplement "subi". ("date donnée" et "heure donnée" sont en gras car le modèle met en évidence deux concepts d'échelle de temps que je n'arrive pas à formaliser de la même manière. Cela me laisse perplexe, mais je finirai bien par trouver la faille ... ou la réponse).

Le "rendez-vous" est la transition entre la prévision et le réalisé. Pour imager, il fait l'effet d'un "trou noir" qui avalerait de la donnée prévisionnelle pour créer un monde parallèle descriptif du passé. On y retrouve la même philosophie de "stock", en parfaite symétrie, mais qui n'est plus utilisable qu'à des fins de pilotage au sens large, incluant la pérennisation du fonctionnement du système sur les cycles suivants. Les notions de flux n'existent plus que sous forme de traces laissées par leur passage. C'est le monde chéri par les statisticiens et autres chercheurs amoureux de la compréhension des phénomènes économiques ...

Voilà ce que je voulais vous livrer. Rien d'extraordinaire par rapport à votre conviction comme vous avez pu le constater; je pense que nous sommes totalement en phase.

Je pousse peut-être le bouchon un peu plus loin en affirmant que les atomes que constituent les stocks s'associent entre eux selon des lois invariantes pour constituer une molécule complexe ... "Le Système d'Information", et que tout cela n'est pas simplement le fruit du hasard (l'image chimique n'est pas totalement anodine ...).

La diversité n'existe que par la différenciation des modalités de mise en œuvre : diversité dans les organisations, dans les procédures ... bref, tous les aspects du "Comment".

On peut dire encore beaucoup de choses sur le fonctionnement des Systèmes d'information, notamment au plan des concepts généraux (lois de sous-traitance, description complète de l'évolution d'un système par un nombre fini de verbes "archilexemes", politiques d'Entreprise, indicateurs de cohérence et localisation, etc. On peut même s'amuser à essayer d'établir la jonction avec les disciplines scientifiques en déroulant les lois de sous-traitance.

Il reste malgré tout encore quelques points pour lesquels je ne suis pas pleinement satisfait de la réponse que j'apporte.

Je finirai sûrement par trouver ce que je cherche, mais tout cela demande du temps ....

Pour conclure, j'avoue que je serais très intéressé de connaître les raisons qui vous ont conduit à cette conviction, si cela n'est pas un secret, bien entendu !

Amitiés

Robert