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Pour qui est écrit De l'Informatique ?

28 avril 2007

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Pour lire un peu plus :

- De l'Informatique

La conversation avec Jacques Printz[1] est toujours fructueuse. « J’ai lu De l’Informatique, m’a-t-il dit. Ce livre est intéressant, mais à qui est-il destiné, pour qui l’as-tu écrit ? »

« Pour les capitaines », ai-je répondu : je n’ai pas eu besoin d’en dire davantage car nous avons l’habitude de converser. Mais ici je dois m’expliquer plus complètement.

*     *

De l’Informatique est destiné aux entrepreneurs, aux dirigeants dont les décisions orientent les entreprises. Mais je sais que les dirigeants ne lisent plus, qu’ils vivent sur le capital de connaissances et d’expérience acquis avant leur accès aux fonctions de décision : soit ils sont trop préoccupés pour lire, soit ils croient en savoir assez (puisqu’ils ont « réussi »), soit encore ils misent plus sur l’instinct que sur la réflexion.

Lorsque le Vom Kriege de Clausewitz (1780 - 1831) a été publié en 1832 il n’a pas été lu par les généraux mais par de jeunes officiers comme Moltke (1800-1891). Il n’aura d’influence qu’une trentaine d’années plus tard, lorsque ces officiers auront accédé aux responsabilités stratégiques.

Je ne prétends pas comparer De l’Informatique à l’œuvre de Clausewitz, mais je n’espère pas que son influence, s’il en a une, puisse être plus rapide. Ses premiers lecteurs ne seront pas les entrepreneurs, les dirigeants, mais les sous-lieutenants et capitaines de nos entreprises, c'est-à-dire les jeunes ingénieurs, organisateurs et informaticiens. Il ne pourra porter ses fruits que lorsque, les années ayant passé, ses lecteurs auront accédé aux fonctions de direction.

*     *

Jacques Printz a fait deux autres remarques judicieuses : « Ce n’est pas un livre technique, mais tu évoques incidemment des points techniques précis » ; « Tu as cité Proust (p. 40), c’est audacieux dans un ouvrage sur l’informatique ».

Jean-Paul Benzécri m’a dit : « le monde se divise en domaines distincts entre lesquels il ne faut pas chercher de communication parce qu’il n’en existe pas : il faut les considérer un par un ». Le monde se présente au contraire à mon intuition comme une unité dans laquelle la diversité des points de vue introduit des séparations artificielles.

Je tente de retrouver cette unité en reliant, en recoupant les points de vue. C’est pourquoi j’aime à illustrer le raisonnement par des images et par des références culturelles, tout en l’appuyant sur des indications techniques exactes. On peut, selon les goûts, considérer cette habitude comme un travers ou comme un avantage.

Il me semble impossible de décider qui a raison de Benzécri ou moi. Je respecte son intuition, car je sais qu’elle est féconde. J’espère que la mienne l’est aussi, d'une autre façon.


[1] Jacques Printz est titulaire de la chaire de génie logiciel et responsable du département informatique au CNAM.