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Le prix des micro-ordinateurs

Concurrence entre mainframe et micro-ordinateur

La concentration de puissance et de mémoire sur le micro-ordinateur lui permet de concurrencer le mainframe : à travers la mise en réseau et la scalabilité, le micro-ordinateur est devenu le support d’une performance analogue à celle des supercalculateurs.

Evolution des performances (Mips) ; (source : Jean-Paul Figer " Les grandes tendances de l’évolution de l’informatique 1950-2010 ")

Coût comparé des micro-ordinateurs et " mainframes "

La fabrication d’un ordinateur étant est une industrie à coûts fixes (c'est-à-dire que la quasi-totalité du coût de production est dépensée dès la phase initiale de conception et de mise en place des installations), le coût moyen dépend essentiellement de la taille du marché. C’est ce qui explique la déséconomie d’échelle qui caractérise le marché des ordinateurs : plus un ordinateur est gros, plus le coût moyen de l’unité d’œuvre est élevé (et donc plus le prix de vente est élevé), car le marché est plus étroit..

 

IBM 3090

Serveur Unix

PC

MIPS

300 000 F

2 500 F

20 F

Mo disque

50 F

10 F

1 F

Mo RAM

30 000 F

700 F

50 F

Source

Ovum Ltd

Sun

PC direct

Comparaison des prix des matériels (source : Jean-Paul Figer, op. cit. )

Comme le marché des gros ordinateurs est plus étroit que celui des PC, le coût de leur conception et de leur mise en production doit donc s’équilibrer sur un plus petit nombre d’unités, et le prix unitaire à performance équivalente est plus élevé. (Le marché des PC est d'autant plus énorme qu'au marché de premier équipement, très actif en raison de la baisse des prix et de l'effet de mode associé notamment à l'Internet, s'ajoute un marché de renouvellement : la montée des performances est telle qu'en pratique la durée de vie économique d'un ordinateur est de trois ans, de telle sorte que chaque année le flux des ventes nouvelles est égal au nombre des nouveaux utilisateurs, plus le nombre des utilisateurs anciens divisé par trois.)

La déséconomie d’échelle explique la tendance irrésistible à la décentralisation de la puissance et de la mémoire des ordinateurs (architectures client / serveur, " downsizing ", Intranet etc.). Certes l’utilisation des ressources est physiquement plus efficace si elles sont concentrées sur une seule machine sécurisée utilisée à temps complet (loi de Grosch). Mais l’utilisation économiquement efficace des ressources est celle que l’on obtient en disséminant processeurs et mémoires et en les reliant par un réseau, même si chaque PC n’est utilisé que quelques pour cent du temps.

Évolution du prix des micro-ordinateurs

Un coup d’œil sur l’indice des prix des micro-ordinateurs suffit pour voir qu’il se passe quelque chose d’important.

Cet indice baisse depuis 1990 de plus de 30 % par an ; une telle baisse est de nature à effacer toutes les résistances, à défoncer tous les " prix de réservation " que les responsables des entreprises et les ménages peuvent avoir en tête. Celui qui ne " veut pas en entendre parler " oubliera ses réticences en quelques années, et alors il " s’y mettra ".

Les tentatives visant à commercialiser des produits concurrents censés coûter moins cher en raison de fonctionnalités réduites (" Network Computers " et autres) sont vouées à l’échec : même si leur conception et la mise en marche des unités de production coûtent moins cher que celles du micro-ordinateur, l’économie d’échelle que la taille du marché procure à celui-ci permettra de faire baisser son prix davantage encore ; les produits qui auront essayé de se placer en dessous de lui dans la gamme des prix seront écrasés, car aucun produit concurrent ne peut résister à un baisse de prix d’une telle rapidité.

L’indice INSEE du prix de vente industriel des micro-ordinateurs est établi, conformément aux méthodes classiques en matière d’indice de prix, à qualité constante. Il décrit donc non l’évolution du prix moyen des micro-ordinateurs (puisque la qualité du micro-ordinateur standard croît continûment), mais l’évolution du prix qu’aurait un micro-ordinateur à qualité constante si celui-ci était offert sur le marché durant la période couverte par l’indice. Il s’agit donc de l’évolution du rapport " prix moyen constaté sur le marché / qualité standard sur le marché ". (Source : Emmanuel Delame " Les bouleversements du marché de la micro-informatique " INSEE Première septembre 1995).

Pour suivre cet indice, il faut consulter l'INSEE (par Minitel : 36 17 PVI, code PVIC300201) ; le 16 novembre 1999, la dernière valeur publiée est celle du troisième trimestre 1998).

Indice trimestriel du prix de vente industriel des micro-ordinateurs (Source : INSEE)

La baisse, continue, s’accélère en 1990. La courbe prend alors la forme d’une exponentielle décroissante, le taux de baisse étant approximativement constant. Pour comprendre cette série, observons son taux de variation en équivalent annuel (le niveau " - 30 % " sur ce graphique signifie que l’indice a évolué ce trimestre-là à un taux qui, sur un an, correspond à une baisse de 30 %) :

Évolution du taux d'évolution annuel du prix des micro-ordinateurs calculé en enchaînant les indices base 100 1990 et 1995. Pour améliorer la lisibilité du graphique, le taux de variation est calculé en faisant une moyenne mobile sur trois trimestres renouvelée deux fois.

Cette courbe montre que le taux de baisse annuel se situe entre 30 et 40 %, et tout fait prévoir que ce rythme va se maintenir. Nous n’avons pas connaissance d’autres évolutions aussi rapides et aussi prolongées d’un prix industriel. Ce phénomène a eu des conséquences : nombre de vendeurs de PC, prospères au début des années 1990, ont été ruinés par la dévalorisation rapide de leur stock. Ceux qui ont survécu ont appris à " tourner " avec un stock très faible et à vendre par correspondance (exemple : Dell).

Le prix moyen de l’ordinateur baisse moins vite que l’indice de prix, puisque la qualité augmente. Cependant il diminue: il était de 35 000 F en 1990, 17 000 F en 1994, il est aux alentours de 7 000 F en 1999, soit une baisse de 17 % par an. Il est donc erroné de croire que la baisse de l’indice serait compensée par l’effet qualité, le prix restant constant parce que les machines se compliquent : la baisse s’explique pour moitié par la hausse de la qualité, pour moitié par la baisse du prix moyen. Si l’on combine évolution du coût du PC et déséconomie d’échelle, on obtient donc un effondrement du prix à performance égale :

  • au début des années 1980, le superordinateur Cray 1, capable de traiter 100 MIPS, était vendu 60 MF. Il nécessitait une grande salle machine et des équipements de climatisation.
  • en 1999, la machine multimédia de base pour le grand public est un micro-ordinateur de même puissance, à base de Pentium II, doté de la même capacité mémoire. On le fait fonctionner sur un bureau, sans prendre de précautions particulières. Son prix est d’environ 7 000 F, soit en francs constants 20 000 fois moins que le Cray 1.

Baisse du prix moyen des micro-ordinateurs (en kF) (8)

  • le PC classique de 1989 avait un processeur Intel 80386 ; avec une vitesse d’horloge de 16 MHz, un disque dur de 80 Mo, une mémoire vive de 2 Mo, et équipé des logiciels classiques du moment, il coûtait 31 kF hors taxes (soit 39 kF hors taxes en prix 1999) ; (source : Laurent Bourot " Indice des prix des micro-ordinateurs et imprimantes ", note 571/E312 INSEE 12 mai 1997)
  • Le PC banal de 1999 a un processeur Pentium II MMX ; avec une vitesse d’horloge de 400 MHz, un disque dur de 5 Go, une mémoire vive de 64 Mo, une carte son et vidéo, et équipé des logiciels classiques du moment, il coûte 7 kF hors taxes, soit une baisse de prix de 80 % en 10 ans.
  • Extrapolons " pour voir ", sans aucune précaution, en nous appuyant sur la loi de Moore. Le but de l’exercice est non de savoir ce que sera le PC dans dix ans, mais ce que donne à cette échéance la simple extrapolation de la tendance passée : le PC banal de 2009 aurait une vitesse d’horloge de 10 GHz, un disque dur de 300 To, une mémoire vive de 2 Go, et coûterait 1,5 kF en prix 1999.

Comparaison avec l'indice américain

On peut trouver sur l'Internet un indice mensuel américain calculé depuis janvier 1993 qui couvre le même champ que celui que nous venons d'étudier ; le 16 novembre 1999, le dernier indice disponible est celui du mois d’octobre 1999.

Il est toujours risqué de comparer des indices de prix calculés sur des pays différents, avec des méthodes différentes. Quoi qu'il en soit des précautions à prendre, voici l’évolution de l’indice américain :

Indice mensuel du prix de vente industriel des micro-ordinateurs (Source : Bureau of Labor " Producer Price Index ", " Personal Computers and Workstations ", Series ID : PCU3571#14 . On le trouve sur le serveur http://stats.bls.gov/ )

Voici la comparaison des taux d'évolution des deux indices :

Prix des micro-ordinateurs, taux d'évolution des indices français et américains

L'ordre de grandeur des rythmes de baisse est analogue sur les trimestres récents (je ne m'explique pas pour le moment pourquoi l'indice américain diminue moins rapidement en 93 et 94 ; il se peut que cela soit dû à une différence de méthode dans la prise en compte de l'effet qualité).

Eléments d'information complémentaires

Il est intéressant d'observer comment se comportent les prix des composants essentiels du micro-ordinateur. Voici les indices de prix des mémoires (source INSEE minitel 36 17 PVI, code PVIC321006) et des " Micro-processeurs, micro-contrôleurs et périphériques " (source INSEE minitel 36 17 PVI, code PVIC321005) ; j'ai marqué en bleu le premier indice, publié de 1989 à 1993, et en rouge le second indice publié depuis 1994. J'ai supposé que les raccordements se faisaient bien, ce qui semble être le cas au vu des indices publiés.

Il est utile de voir les évolutions de ces indices. Les courbes ci-dessous indiquent les taux de croissance en rythme annuel : en bleu le taux brut, en rouge le taux après une moyenne mobile sur trois trimestre répétée deux fois.

On peut bien sûr s'interroger sur la relation qui existe ou n'existe pas entre ces évolutions, qui connaissent des épisodes de hausse, et celle du prix des micro-ordinateurs, qui diminue régulièrement. C'est une étude qui reste à faire. Pour progresser dans l'analyse de ces indices, j'ai proposé à l'INSEE de faire une étude destinés à publication dans "Economie et statistique". Cf. ma lettre à Paul Champsaur du 18 mai 1999. J'ai reçu le 31 mai un appel téléphonique de Mme Françoise Dupont, chef de la division des prix de vente industriels à l'INSEE, qui me fait bien augurer de la réalisation de cette étude ; j'ai reçu le 17 juin une réponse positive de Paul Champsaur.

Je donne ailleurs de premières indications sur l'évolution des caractéristiques physiques des ordinateurs.