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Commentaire sur :
Eric J. Hobsbawm, Aux armes, historiens, La Découverte 2007

30 mars 2008

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Pour lire un peu plus :
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Brève histoire de la légitimité
-
Histoire d'un Allemand
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Staline
La révolution française a-t-elle été un événement historique important ? a-t-elle été utile ?

François Furet, Bernard-Henri Lévy et quelques autres ont répondu par la négative. La révolution n'a pas été utile, disent-ils, car la société française aurait pu évoluer, s'industrialiser, se moderniser sans passer par un épisode aussi destructeur. Par ailleurs, ajoutent-ils, ses conséquences ont été moins importantes qu'on ne le dit : après la révolution, l'évolution de la société a repris son cours normal comme si rien ne s'était passé. Au total, elle n'a donc constitué qu'un immense et déplorable gâchis.

Pourtant, dit Hobsbawm, les historiens et penseurs du XIXe siècle, plus proches que nous de l'événement et donc mieux à même d'évaluer son importance, ont vu dans la révolution une rupture fondamentale - les uns pour la déplorer, d'autres pour s'en féliciter. Parmi ces derniers la plupart ont estimé que les excès de la révolution, certes regrettables, n'étaient pas un prix trop élevé pour les progrès qu'elle avait permis.

La révolution française a par la suite servi de référence, de modèle, aux révolutions ultérieures et en particulier à la révolution russe. Les bolcheviks ont analysé les événements qui se produisaient sous leurs yeux en se référant, d'une façon d'ailleurs quelque peu mécanique, à ses épisodes et ses personnages : Thermidor, le 18 Brumaire, Robespierre, Danton, Bonaparte etc.

*     *

Qu'est-ce donc qui a poussé Furet, Lévy et quelques autres, aux alentours de la commémoration de 1989, à dénigrer de la sorte la révolution française ?

Ils voulaient en fait dénigrer la révolution elle-même, prouver l'inutilité radicale de toutes les révolutions. Sans doute était ce un retour de balancier après les excès de l'esthétisme révolutionnaire de 1968 ; il s'agissait aussi de ne pas se sentir complice des horreurs du goulag - horreurs qu'ils plaquaient, de façon rétrospective mais sans respect envers les proportions, sur la révolution française elle-même et, par extension, sur toute révolution possible.

À l'esthétisme révolutionnaire, certes naïf et sans doute coupable, ils substituaient sous prétexte de compassion envers les victimes un esthétisme réactionnaire à prétention moralisante.

Ainsi des préoccupations politiques et symboliques contemporaines conditionnaient l'évaluation d'un phénomène historique et militaient pour nier son importance comme son utilité. Or dénigrer la révolution n'aide en rien à comprendre la coupure qu'elle a introduite dans notre histoire, ni à surmonter le conflit de valeurs qu'elle a suscité.

Hobsbawm, analysant l'historiographie de la révolution, montre le caractère éphémère de la tentative de François Furet. Le mouvement d'idées que celui-ci a tenté de lancer est resté sans lendemain parmi les historiens mais il a encore des échos dans les médias : lire Hobsbawm aide à décrypter les propos du fameux BHL, de Glucksman et autres "philosophes" médiatiques.